Le Centre d’art Garage Cosmos acceuille les Harley Davidson de Johan Muyle

Début 2019 la mythique Harley Davidson passera, économie de survie oblige, au moteur 100% électrique. Tans pis pour les amateurs de belles sonorités, tout a une fin. Johan Muyle, artiste et motard, lui n’abdique pas, il reste fidèle au mythe. Ses belles montures customisées sont montrées au Garage Cosmos jusqu’au 20 janvier 2019. Courez-y !

Célébrée par BB et Gainsbarre, elle a en France sa mélodie fétiche qui claque encore dans nos oreilles à l’instar du ronflement caractéristique du moteur bicylindre en V qui passe en intro dans le disque. Au niveau planétaire elle a connu son heure de gloire. On a encore en tête la bande son, Born to be wild du film Easy Rider sorti fin des années soixante. Chevauchant leurs Harley, Peter Fonda et Dennis Hopper l’on fait entrer dans la légende du rêve américain.  Johan Muyle, artiste contemporain, est un inconditionnel des Harley, il les collectionnent, les bichonnent et en fait de véritables œuvres d’art rutilantes. En les customisant avec passion, il les fait entrer dans son vocabulaire plastique teinté d’oxymores et de jeux de mots. Pour l’artiste, la moto c’est d’abord une philosophie de vie, une manière d’être au monde tout en affichant ses paradoxes et sa singularité. Memento Mori, le nom donné à une de ses motos est exemplatif à ce sujet. L’artiste a fait graver sur le pare-chocs arrière : « We were like you, you will be like us », ce vieil adage romain nous renvoie à cette dure réalité : Nous sommes de passage, tout est vanité. Des disques de freins à la selle de croco en passant par tous les accessoires de haute valeur symbolique qui la constituent il en fait une œuvre futuriste avec plus value. Il est sûr et certain que Marinetti, s’il avait vécu à notre époque, aurait adoré la chevaucher.  En invitant Johan Muyle à exposer ses motos customisées dans son lieu au nom prédestiné, Garage Cosmos, (ça ne s’invente pas!) Eric Fabre se fait plaisir. Le galeriste collectionneur signe dans la préface du catalogue un texte bien ajusté qui évacue l’idée du ready made pour revenir à des courants avants gardistes plus liés à la vitesse. Pour argumenter son propos, il reconvoque deux personnalités de l’histoire de l’art qui ont célébré l’introduction de l’idée de la machine et de la vitesse dans la sculpture : Raymond Duchamp Villon, qui s’est fait connaître en 1914 avec sa sculpture le Cheval majeur et Henri Gaudier-Brzeska, artiste anarchiste libertaire mort tra­gi­quement en 1915 à l’âge de 23 ans. En art, on peut tout se permettre et la transgression est d’usage. Ce n’est pas Johan Muyle qui le contredira, lui qui a choisi comme logo symbole pour la cover de son catalogue, un poing serré sur fond de roue aux allures duchampiennes. Faut-il y voir une volonté secrète de casser le formalisme encombrant du ready-made ? Dans son art, l’artiste aime cultiver ce fond de rébellion qui amène un côté rock and roll dans sa démarche.
Les deux performances illustrées dans le cata­logue,  Burnout Machine qui consiste à faire de la fumée en faisant patiner sa roue arrière et Sculpture Surfing, exercice d’équilibre qui consiste à se tenir debout sur la selle de sa moto en marche participent de cette rock and roll attitude.
L’artiste a toujours voulu dans son parcours professionnel faire preuve de syncrétisme en mixant art populaire et art élitiste. Pour finaliser ses créations, il fait très souvent appel aux ateliers d’artisans. Réconcilier l’Art et le Peuple, par les temps qui courent un beau challenge à relever pour un artiste…

Lino Polegato

Entretien réalisé au Garage Cosmos.
Lino Polegato: Tu ne veux pas parler de ready-made pour tes motos customisées, pourquoi ?
Johan Muyle : Je comprends qu’il y ait une apparente ambiguïté mais ces objets sont fonctionnels et je roule avec. Je rapproche ça du street art. J’ai toujours voulu faire un syncrétisme dans mes sculptures entre la culture populaire et par ailleurs l’art contemporain. Si on veut être péjoratif vis-à-vis de l’art contemporain on peut parler d’élite. 
Le lien entre les deux m’intéresse au plus haut point et dans la pratique de la Harley Davidson il y a bien sûr une part de mythologie. Ce qui fonctionne avec la Harley Davidson c’est la possibilité de démonter l’ensemble de la moto, et de la reconstituer, c’est peu faisable avec d’autres motos qui sont plus désignées. Ici la mécanique est très simple, il y a un bloc moteur, un bloc transmission, la boîte de vitesses et puis la roue, c’est très basique.  Comme ça existe depuis une éternité, il y a tout un aftermarket qui donne la possibilité de la customiser. Ça m’a pris neuf mois de travail. Les intervenants sont nombreux. Le « gros œuvre » a été réalisé par American Fever, un garage spécialisé à Angleur. Des designers italiens ont participé. J’envoie des plans et je leur demande de réaliser des choses. Les roues ont été commandées aux États Unis. Les disques de freins ont été gravés et réalisés en Belgique. C’est une connexion entre la France, l’Italie, les EU et la Belgique…

L.P. : Il y a plusieurs mythologies qui cohabitent, qu’est ce qui symbolise le mieux la Harley ?
L’image qui m’intéresse c’est celle d’Easy Rider, c’est I’m poor lonesome cow-boy, John Ford revisité dans les années soixante. C’est parcourir les longs espaces en toute liberté, c’est une ode libertaire, ça continue le mythe du cow-boy qui parcourt le désert,

L.P. : Les figures de styles c’est de l’humour ?
Pratiquer la moto comme sur une planche de surf, c’est une pratique habituelle lors des grands rendez-vous de moto. C’est comme enfant quand on lâche son guidon. Je les pratique ces motos, je fais plusieurs fois par année des longs runs en solitaire.  Le monde de l’art est omniprésent quand on est artiste, pratiquer la moto est un moyen de m’ex­traire de ce monde.


Sculpture Surfing
Johan Muyle
Garage Cosmos (Uccle)
15 décembre – 20 janvier 2019
du vendredi au dimanche, 13h – 18h
Le livre de Johan Muyle «Sculpture Surfing» est paru aux éditions du Caïd.
Seront présentés en expo: Sioux in Paradise, (2016), un chopper custom, Memento Mori (2010), un bobber custom, No More Heroes (2008-2018), un Heritage custom et Burnout Machine (2010-2017),nun fatboy custom.

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