Glanures estivales du Sud

Mirages & Miracles Adrien Mondot et Claire Bardainne 1ere Presentation ( Etape de travail ) Les Subsistances Mirage Festival Mars 2017

Au sein du foisonnement estival des expos en France, voici un échantillonnage de quelques moments forts dans le Sud. À savoir l’annuelle sélection de sculptures à la Villa Datris, une œuvre graphique interactive et de la photographie au Camprédon, un aperçu gigantesque de la collection permanente en compagnie d’un quatuor à la fondation Lambert (Tayou – Jospin – Scully – Lawler) et une insertion urbaine aux Baux-de-Provence.

La variété des propositions permet aussi bien des retrouvailles avec des créations déjà vues et des découvertes impressionnantes. Le temps des vacances persiste à rester aussi celui de la culture pour ceux qui ne se contentent ni de bronzer, ni de randonner. Rien n’est incompatible. Au contraire. 

Centre de gravité

La thématique de la gravité nous rappelle combien l’équilibre est chose précaire autant qu’essentielle, combien nos yeux sont perméables aux illusions. Le Camprédon rénové accueille le possible et l’impossible, la réalité banale et l’irréel vraisemblable.

Gabriel Sobin introduit le visiteur avec la notion de pesanteur. Ses sculptures en marbre représentent à la fois le rappel des outils préhistoriques, la géologie locale, le poids inhérent à la minéralité. Il se penche aussi bien sur la massivité que sur une certaine légèreté. À côté de l’apparence du brut et du pesant, voici cinq cercles inspirés par des disques en pierre du néolithique en position d’envol et voici une partie du cosmos sous forme de sédiment en cire d’abeilles où s’incrustent des éclats d’onyx en illusion de constellations. Voici encore, transition vers la suite, une masse monumentale au sommet d’un portique« barque solaire ou vaisseau lumineux ».

Sous le titre « Miracles et mirages», Claire B(ardainne) étale des dessins en noir et blanc et Adrien M(ondot) leur adjoint la technologie de la réalité augmentée ainsi que celle des illusions holographiques. Tels quels, ils affirment un graphisme fort et délicat pour offrir au regard un assortiment de cailloux. Mais, aussitôt que l’on braque vers eux une tablette électronique, une vie invisible fait son apparition, les pierres palpitent, irradient une énergie perceptible, se métamorphosent, suivent une trajectoire galactique, entrent en éruption, parfois s’accompagnent de créatures en forme d’ombre noire. Ce qui se déroule alors stimule des sensations inédites, suscite des scénarios fantastiques. C’est un envoutement hypnotique qui donne apparences réelles à l’onirique.

À l’étage, retour au plus classique : la photographie. Voilà un échantillonnage de jeux avec la pesanteur et l’apesanteur, l’équilibre et le déséquilibre. Jacques Henri Lartigue surprend des personnes en pleine lévitation. Anne Rearick saisit des enfants en plein jeu. Forgetmat suggère en couleurs des envols humains bousculant la perspective. Yves Klein effectue son célèbre plongeon urbain tandis qu’un pseudo journal de 1960 lui associe sa une. 

Bernard Plossu s’attache à des vols d’oiseaux. Renaud Marion envoie des bagnoles comme soulevées par une extase mystique tandis qu’Anne Pharel cultive le mirage d’une forêt féérique et que Geneviève Gleize met en scène ces lieux d’illusionnisme que sont les théâtres.

C’est une installation collective (Ferrer, Gleize, Viol) qui, en accumulant des paires de chaussons de ballerines au mur et sur sol, décrit, avec l’ironie du jeu de mots, « La Chute d’une étoile » Mêlant pages imprimées, collage et broderies, Sylvie Hénot métamorphose des livres anciens traitant d’astronomie en objets surréalistes. Dans la cage d’escalier, composée de gouttes de verre et de fils de laiton, une sculpture flottante de Christine Ferrer aide les montants à franchir l’étage où se situe un jeu d’impression entre des plaques de verre, entre lesquelles Charbonnel emprisonne à jamais de fugitifs nuages sous forme de « Nébulogrammes ».

Eduardo Kac, « Performance pour un astronaute, une paire de ciseaux et deux feuilles de papier », 2015 © Eduardo Kac / Courtesy L’Observatoire de l’Espace du CNES

La création artistique rejoint la réalité de la conquête spatiale à travers une collaboration entre l’astronaute Thomas Pesquet et le plasticien Eduardo Kac. Ce dernier a parsemé sur les murs une série de dessins au graphisme épuré qui retracent la fabrication de son « Télescope intérieur », instrument de papier en guise de maquette d’une potentielle longue vue. Une expérience de sa mise en apesanteur tentée durant un vol spatial en 2017 est visible grâce à un film projeté dans l’auditorium. L’ensemble s’accompagne de diverses tentatives de traduction plastique d’apoapse, autrement dit du point le plus éloigné de l’orbite d’un objet céleste par rapport à lui, et d’une sorte de chorégraphie de l’interaction fantaisiste du télescope et d’un cosmonaute.

« (Zéro) Gravité » au Camprédon jusqu’au 8 octobre 2023 à L’Isle-sur-la-Sorgue. Infos : + 00 33 04 90 38 17 41 ou https://www.campredonartetimage.com/

Mouvement et lumière

Chez Datris, comme chaque année, diversité des choix. Cette fois, la sculpture est confrontée à la lumière et au mouvement. Chaque œuvre se reçoit comme un poème.

Soto : fluide labyrinthe bleu où se perdre sans se noyer.

Mérida : du temps qui crée des continents de sable en perpétuel mouvement.

Le Parc : sphère d’un azur prisonnier entre des parcelles d’espace.

Shingu : acier mobile à battre la pesanteur.

Veilhan : fruits des vents propices à des moments suspendus.

Takis : sphère dont le poids noir joue à se croire en suspens.

Othoniel : mettre le mur à même de miroiter.

Yang : robinets connectés à être autosuffisants.

Schumann : bronzé à la lumière noire le mystère s’irradie.

Holzer : lettres qui racontent, brouillent, content et recontent.

Morellet : néon qui se paraphe en aiguisant ses angles.

Baude : condenser l’arc-en-ciel en un élan vital.

Lang : néon bavard hésitant sur ses teintes.

Dill : alchimie d’un argon mis en phrase cabalistique.

Lagarrigue : mener la plante à une folie douce.

Bowers : feuillage d’acier devenu sentencieux.

Debraux : branchette magique pour invisible fée.

Pernot : lumineuse pensée sous tension.

Höller : rébus mathématique tendant vers l’infini.

Crespin : algorithmique ballet dont la musique est tige.

Elliasson : généalogie du polyèdre soumise à la lumière.

Parreno : marquise privée de sa noblesse se retrouve en cuisine.

Decauzat : géométrie esclave des regards fuyants.

Cruz-Diez : la liberté conquise par d’ autonomes couleurs.

Chevalier : vidéo tisserande tramant utopique complot.

Miyajima : chronomètre de l’intemporel des existences internes.

Tinguely : lampe de salon pour clown hilare.

Appolonio : L.S.D. visuel à vertige garanti.

Navarro : plongée sans mise en abyme de son abîme.

Calos : cosmos concentré,

Varisco : à l’envers, à l’endroit, temps s’écoule.

Ahn : sous d’imperceptibles autoroutes, extase de forêt de piliers.

 Demarco : afin d’aimer la nuit, éclair danseur étoile.

Roeckel : minéral planté déjà mûr

Bury : titiller le temps et caresser l’espace.

Kowalski : pyramide mathématique inscrite dans le présent.

Guerrier : plume à mots doux a son  ange perdu.

De Vecchi : guerrier contre toute intrusion.

Rey : camoufler le repère par végétal fouillis.

Sobrino : au rendez-vous d’acier, un couple structurel.

Barrios : cascade bleutée en tourbillon figé.

Hein : réverbères en ivresse lors d’une nuit sans lune.

Crespin : magie triangulée en permanente illusion.

Marinho : carrés cascadeurs avant triple salto.

Tomasello : jeter les dés en vue de conjurer toute malchance blanche.

Agam : à l’escale, escalader à l’horizontale la fuite des couleurs.

Kreitner : totem contre les vents contraires.

Stein : miracle de la boule multipliée à l’infini d’elle-même.

Cette exposition, écrit Domitille d’Orgeval, est celle « du refus de considérer l’œuvre d’art comme une structure figée et d’une volonté de la débarrasser de tout substrat matériel. » Elle s’étend sur deux étages et un sous-sol et se prolonge dans le jardin. Les œuvres y trouvent une mise en valeur qui les rend plus proches encore de nous d’autant que les cartels sont clairement didactiques.

« Mouvement et Lumière  #2 » jusqu’au 1 novembre 2023 la Fondation Villa Datris à l’Isle-sur-la-Sorgue. Infos : 04 90 95 23 70 ou www.fondationvilladtris.com

Catalogue : Domitille d’Orgeval, « Mouvement et Lumière  #2 », l’Isle-sur-la-Sorgue, Fondation Datris, 160p. (29€)

Tayou ,”Plastic Tree” , 2014-2015 » Branches, sacs plastiques, dimensions variablesVue de l’installation, Art Basel Unlimited, 2015. Courtesy of the artist and GALLERIA CONTINUA © ADAGP, Paris, 2023 Photo : Andrea Rossetti

Jubilatoire contestation

Vivant et travaillant à Gand et à Yaoundé, capitale de son pays natal, Pascale Marthine Tayou (1966, Nkonsamba) atteste du monde chaotique dans lequel nous vivons, non pas avec virulence et sarcasme mais, comme il le dit lui-même, avec « joie et humour ». De fait, les œuvres et installations de ses « Petits riens » possèdent une dimension festive et allègre tout en s’intéressant à des thématiques actuelles angoissantes : décolonisation et géopolitique, pollution et profusion, aliénation et liberté, conflits et pacification, conditionnement et inventivité, nationalisme et multiculturalité… C’est donc un véritable plaisir que de parcourir ses installations qui amènent à la réflexion grâce à son détournement systématique de nos façons convenues de penser et de vivre.

Chaque création offre des signes décodables presque à l’évidence tant ils sont à la fois porteurs et lisibles. Dès l’abord, le fait de disperser au sol des pavés nous rappelle qu’ils sont, au moins depuis mai 68, des instruments de colère et de violence. Mais ceux-ci sont soudain pacifiés grâce à la couleur qui orne une de leurs faces. Plus loin, ce seront des télés, écran tournés vers le mur qui distillent non stop des discours et des comptines, un endoctrinement ironique qui se réfère à nos addictions aux médias de masse et à la désinformation.

C’est bien de notre terre qu’il s’agit, visualisée par une mappemonde composée de continents en terre cuite dispersés sur un mur. Tous ont pour origine une même identique matière dépourvue d’indications géopolitiques. Seulement apparaissent çà et là des éléments scintillants : les richesses propres à chaque région. Symbole nu de l’oubli que nous affichons du fait que nous sommes tous semblables sur une planète commune. Une autre représentation emblématique complète ce rappel de notre potentielle égalité ; elle est récurrente à travers l’exposition : celle de l’asservissement dont il convient de se libérer, suggéré par des chaînes rouillées, brisées et ponctuées d’une touche colorée. Divisions, antagonismes sont étalés dans un labyrinthe dont les parois sont constituées par les motifs et couleurs des drapeaux nationaux de partout. Ludique mais séditieux au possible.

« Pas à pas », combinaison de cannes, est métaphore de notre existence, toujours sous apparence labyrinthique. Ses « Vagues de craie » ondulent avec une apparence plutôt op art et misent sur le mouvement et le rappel de l’usage de cet accessoire scolaire par ceux qui dessinent de l’éphémère sur les trottoirs des grandes cités, ce que concrétisent ses portraits réalistes sur panneau de bois.

Un « Code noir » met en défilé des silhouettes en un tableau dont la structure en lignes verticales n’est pas sans rappeler le code barre qui régit le prix de tout ce qui est à vendre. Son « Fantôme colonial » frappe brutalement quand on se rappelle combien le crucifix comporte un sens lourd puisque l’essentiel de l’apport religieux des colonisateurs fut la christianisation. Traduction plastique : de petits bonshommes en verre, santons laïcs polychromes, fétiches dérisoires, sont assemblés en forme de croix sur une paroi. Leurs habits chatoient, leur peau est basanée. Ils résument à l’évidence ce que fut le colonialisme.

L’écologie tient forum au sein de l’expo. Voici « Oxygène » : suspendus au plafond, des branchages engendrent, en guise de fruits, des bouteilles en plastique transparent agrémentées de morceaux de tissus teintés. Réparties par ci par là, des chaises s’agglutinent en attente de congressistes ou remisées après quelque sérieux colloque riche en verbiages. Découvertes dans une décharge d’objets quotidiens, elles ont été retouchées par Taou, parfois assemblées les unes aux autres au moyen d’une technique particulière de couture. Des panneaux manuscrits inventorient l’historique des grands sommets mondiaux de 1885 à maintenant, accumulant tant de maigres résultats ! 

Transition avant la sortie, une cité maquette comportant des habitations confectionnées en tissus nargue nos démesurées constructions en béton et verre. Il faut maintenant traverser une jungle narquoise dont les arbres produisent des sachets en plastique joliment coloré, ceux-là mêmes qui souillent terre et mer. Entre ces plantations, des figurines de cristal accoutrées d’éléments puisés à diverses civilisations, en hommage au poète Edouard Glissant, partisan convaincu des bienfaits de la « créolisation » de nos sociétés par assimilations de cultures diverses.

On sort de cette exposition ravi des créations vues, conscientisé autrement vers une réflexion à élaborer en vue de changements de comportements et de raisonnement. Le catastrophisme vient de perdre la partie au profit d’un optimisme dynamique.

« Petits riens » de Tayou jusqu’au19 novembre 2023 à la Fondation Lambert d’Avignon. Infos : +33 (0)4 90 16 56 21 ou +33 (0)4 90 16 56 13 ou www.collectionlambert.com

Eva Jospin, ”Chef-d’œuvre #5 “pour Carte Blanche PROMENADE(S), 2022 © Adagp, Paris 2023. Photo : Benoît Fougeirol

Archéologie de l’imaginaire

Si on a affirmé que la littérature fantastique est une fuite face au réel, voire carrément un rejet de celui-ci, peut-être en dirait-on autant des sculptures d’Eva Jospin (Paris, 1975). Ses architectures et ses paysages ne naissent pas de l’observation de ce qui existe mais des souvenirs qu’on en garde aussi bien que des fantasmes qu’on cultive en soi. Elles organisent un « Contre-Monde ».

Jospin travaille le carton, matière plutôt malléable et facile à trouver. Elle le métamorphose en œuvres de petit et moyen format (dans les locaux de la Fondation Lambert) ou en élucubrations monumentales issues d’un baroque personnel (au palais des Papes) avec une identique minutie et délicatesse.

La fragilité du matériau se transmute en une compacité de trouvailles archéologiques : vestiges rescapés ayant bravé les siècles, subi des invasions et des bouleversements naturels, échappé au vandalisme propre aux sites laissés à l’abandon. On imagine ce qu’un Malraux aurait écrit et montré de cette production dans son « Musée imaginaire » en fonction de son épisode des ruines cambodgiennes. En fait, Eva Jospin nous propose des décors. Il nous reste à inventer les histoires susceptibles de s’y dérouler.

Il existe un réalisme rêvé comparable à celui de la réalité. Celui-là appartient au travail méticuleux de la sculptrice. Son résultat regorge de détails. Le carton modelé, cisaillé, découpé, collé, compacté, incisé, inséré, rogné s’érige comme s’érige la géologie, strate après strate, couche après couche, creux après creux, secousse sismique après tremblement terrestre, érosion lente et permanente.

La fascination nait de la contemplation. Celle qui mène à songer que ces inventions sont crédibles. Et que, à partir du moment où elles le sont, toutes les histoires qui s’y relieraient deviennent plausibles. Tel paysage, dépourvu de toute présence vivante, aussi bien animale qu’humaine, conserve souvent celle de la végétation, de l’eau pluvieuse autant que de l’écoulement d’un ruisseau ou d’une rivière. Telle architecture colossale attend le passage de personnages intemporels, implique des intrigues complotées dans certains recoins. Tous sont refuges et tanières . On y installerait volontiers des musiques de Taru Takemitsu, François Bayle, Jean-Luc Fafchamps ou Yves Prin.

Les dessins de Jospin possèdent une finesse similaire à celle des sculptures. Elle emprunte à Carmontelle le système qui consiste à faire se dérouler, entre deux bobines verticales, des transparents sur lesquels sont inscrits à la mine de plomb des panoramas en défilé. Elle les accompagne parfois de broderies. Et pour le Palais, elle a conçu une « Chambre à soie » où ses broderies s‘étalent sur une trentaine de mètres comme une tapisserie ancienne.

La monumentalité des installations déposées au sein des pièces immenses du Palais n’y est pas perdue. Elles s’affirment, gigantesques, vertigineuses, titanesques, démesurées. Le banal carton y prend des allures de marbre antique. On se demande quelles mythologies s’y installeraient.

Cénotaphes, temples, nymphées, labyrinthes, carrières de craie, grottes, falaises, forêts… s’offrent à l’imagination de chacun. Tout en repensant à l’exorbitante prétention humaine de laisser derrière soi, matamore bravache, des traces espérées éternelles.

« Contre-monde » jusqu’au 17 septembre 2023 à la Fondations Lambert et au Palais des Papes d’Avignon. Infos : +33 (0)4 90 16 56 21 ou +33 (0)4 90 16 56 13 ou www.collectionlambert.com

Divers dispersés

À la Fondation Lambert, on n’en reste pas là. Une sélection de la collection permanente s’étire en parcours marathon. On se souviendra de l’ironique et labyrinthique « Sas de contamination » dans lequel Hirschorn a entassé et enchaîné (au sens propre du verbe) un invraisemblable bric à brac de brocante dont des croutes picturales ahurissantes. On pénètre par ce long sas de bribes du monde réel vers le monde de l’art.

En vrac, quelques coups de cœur. « L’Oasis » de Kempinas qui met en lévitation agitée une bande magnétique. Deux acryliques sur miroir de Lavier. Les portraits de personnalités du monde du spectacle vandalisés par Douglas Gordon. Un inquiétant portrait d’un membre du Ku Klux Klan dont on ne voit qu’une partie de sa cagoule avec un œil qui ne vous lâche pas par Serrano. Des installations de Sol LeWitt toujours lumineuses.

Les photos de Louise Lawler mettent le réel familier en images avides de géométrie. Les objets sont inscrits dans l’espace comme si leur immuable place donnait son sens au lieu. Cette rigueur n’empêche pas chaque endroit d’exprimer une atmosphère particulière que la lumière valide de l’intérieur en accentuant discrètement l’étrangeté d’un moment. Sean Scully aligne ses travaux de pure peinture. Des assemblages de monochromes forment une palette dense qui propose à la fois l’espace, la matière et la couleur. A savourer de l’œil comme on le fait avec le nez pour les parfums.

« La peinture est morte, vive la peinture ! » et « Grand Arles Express », « Arles nacht Vincent » à la  Fondation Lambert d’Avignon jusqu’au 15 octobre 2023. Infos : +33 (0)4 90 16 56 21 ou +33 (0)4 90 16 56 13 ou www.collectionlambert.com

Les arbres_brûlés de Philippe Pastor © Office de Tourisme des Baux De Provence copie

Ailleurs, des initiatives ont surgi un peu partout. En outre, dans « Les Carrières de Lumières » sont projetées très à la mode des images numériques en immersion à propos de Vermeer, Van Gogh, Tintin, Mondrian. Le pittoresque village des Baux-de-Provence a invité un artiste particulier, Philippe Pastor (Monaco, 1961).

Ce dernier expose en plein air ses « Arbres brûlés », actualité artistique particulièrement adéquate en ces régions où les feux forestiers ne cessent de ravager les paysages. Les troncs qu’il a dressés sont soit bruts, soit agrémentés d’éléments comme des plaques de céramiques colorées qui contrastent violemment avec le noir. Tels qu’ils sont, ils prennent valeur de stèles, de forêts à recomposer. Leur potentiel symbolique s’est encore accru depuis l’accélération des déforestations.

Ses toiles à dominante bleue se réfèrent évidement à l’eau aussi bien qu’au ciel. Elles sont comme la majorité de ses peintures des compositions matiéristes. Des éléments étrangers tels que sable, poussières, végétation se mêlent à l’acrylique. L’artiste joue avec cette espèce d’alchimie ordinaire qui provoque des crevasses, des craquelures, des coulures, des anormalités comme cela se produit avec la pollution. Son apparente abstraction se révèle figuration. Se propose porteuse d’une perception écologique du monde qui nous environne.

« Comment va le monde ? » de Pastor : divers lieux du village jusqu’au 30 septembre 2023. Infos : Tél. +33 (0)4 90 54 34 39 ou https://www.lesbauxdeprovence.com/agenda/exposition

Catalogues : Alexandra Marini, «Pastor», Monaco, Galerie De Jonckheere/Monaco Modern’Art, 2017,116p.

XX, « Philippe Pastor : Les arbres brûlés », Monaco, Art&Environnement, 2017, 30p.

Les photos de Doisneau ne vieillissent pas. Son attention portée à l’humain reste perceptible même quand elle a été fabriquée comme son fameux « Baiser de l’Hôtel de Ville» dont une brève vidéo raconte la genèse. Le photographe adore les scènes de rue où jouent des gamins, où se rassemblent les badauds auprès d’un cheval tombé sur le pavé. Il saisit les expressions sur les visages des écoliers, de mariés au comptoir d’un bistrot, ou les bouchers d’un abattoir à l’écoute d’une accordéoniste. Il se préoccupe volontiers des ‘petites gens’ et s’il lui arrive de fixer une célébrité (Tati, Prévert ou Picasso), elle a l’air d’être comme tout le monde.

En regard avec les œuvres d’Yves Brayer (Versailles, 1907 ; Suresnes, 1990) , Emma Bougaeff se fait amie des plantes en les transposant en noir et blanc à travers des dessins réalisés en pointillés avec un stylo à encre. En résulte un aspect mystérieux, une stylisation rigoureuse. La calligraphie abstraite de Yoshiko Yoshida interroge le paysage, renouvelle une approche insolite. Elle en donne une sensation en mouvement. Gabriela Irigoyen façonne des livres singuliers à partir de matériaux issus du quotidien et devenus précieux pour des éditions uniques. Françoise Plée focalise le paysage sur de la végétation en sous-bois. Ses dessins aux coloris miraculeux de luminosité éclatent d’une vie solaire alors qu’ils s’attardent sur des plantes vouées au flétrissement. Pour Mark Beard, un de ses tableaux atteste, sans conteste, qu’il fut un des élèves de Brayer.

« Le temps retrouvé de Doisneau » et « En écho à Brayer » jusqu’au 12 novembre 2013 au Musée Brayer. Infos : Tél. 04 90 54 36 99 / 04 90 97 78 53 ou https://www.yvesbrayer.com/fr/musee-des-baux-de-provence/practical-information/

Michel Voiturier

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