Kiki Smith, chair de lune au Centre de la Gravure

kiki-smith, Sitting with a Snake, c. Galerie Lelong & Co

La première exposition de Kiki Smith en Belgique présente dans la Cité des Loups plus de cent estampes, sculptures et dessins de 1981 à nos jours. Entre corps célestes et terrestres, cette rétrospective pose des traits tendres et durs pour faire naître l’art énigmatique du songe et de la féminité.

De fines étoiles bleues émaillent les veines de ses poignets : « pour me protéger » glisse Kiki Smith de cette voix qui apaise quand elle ne fuse pas en éclat de joie. Sauvage chevelure blanche, l’artiste new-yorkaise semble émerger d’un monde où le clavier des sensations conjugue exaltation chamanique et peurs ancestrales. Elle pour qui exister ne signifie pas être là tout simplement, est l’invitée du Centre de la Gravure et de l’Image imprimée tout en exposant en même temps à Paris, San Gimignano et Oxford. Pour pouvoir réaliser cette toute première exposition entièrement dédiée à l’artiste américaine en Belgique, Catherine de Braekeleer a même repoussé son départ à la retraite : « J’avais déjà réuni plusieurs pièces en 2008 pour l’exposition Cris et chuchotements consacrée à des femmes-artistes. Et j’ai attendu que Kiki Smith soit disponible pour créer cette exposition ! »
A 65 ans, toutes deux composent un duo unique où l’art et l’engagement fusionnent pour créer une force magnétique qui va gagner imperceptiblement chaque visiteur et le conduire sur des chemins parfois étranges. A leur tour, ces pistes vont jouer un rôle de révélateur. Révélateur de tout ce qui flotte, diffus, en chacun. Révélateur des courants obscurs qui nous parcourent. Révélateur du miroir magique d’une lucidité réfléchie.
Dans un travail toujours en glissements, en oscillations, en dérives et dérapages, Kiki Smith pénètre les mystères de l’univers, choisissant cet improbable moment « entre chien et loup », heure particulière du passage du jour à la nuit, ce moment où le chien est placé à la garde du bercail, ce moment où le loup sort du bois.
Scindée en deux parties par la force du lieu d’exposition, la scénographie ménage d’une part la terre, la matière, le corps et d’autre part les contes de l’enfance, la mort, le cosmos dans des œuvres les plus récentes.
Quand on lui pose une question, elle offre cet air étonné et répond systématiquement :  « I don’t know… ». Son silence soupèse une créativité totalement instinctive. Puis, elle dépose sept clés de lecture…
« Toute l’histoire du monde réside dans notre corps. »

L’entièreté du texte est à découvrir à la sortie du FluxNews 81 fin janvier 2020

Dominique Legrand

Kiki Smith. Entre chien et loup / In the Twilight, Centre de la Gravure et de l’Image imprimée, 10 rue des Amours, La Louvière, jusqu’au 23 février 2020. Catalogue, textes de Catherine de Braekeleer, Jean Fremon, Véronique Blondel, 128p., 20 euros.
Kiki Smith.Compass, Galleria Continua, San Gimignano, jusqu’au 6 janvier 2020.
I am a Wanderer, Modern Art Oxford, jusqu’au 19 janvier 2020.
Kiki Smith, La Monnaie de Paris, 11 quai de Conti, Paris, jusqu’au 9 février 2020.

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