CAP AU SUD !
Une bonne idée que celle d’avoir choisi Bernard Marcelis comme commissaire des deux principales expos de l’été à l’Orangerie de Bastogne qui fête ses 20 ans d’activité et au CACLB (Centre d’art contemporain du Luxembourg belge) qui lui fête ses dix ans sur le site de Montauban Buzenol. Une ballade champêtre riche en découvertes pour les amateurs d’art contemporain. Une demi heure en voiture sépare les deux centres d’art. Les plus intrépides pourront même pousser une pointe jusqu’au MUDAM pour y découvrir Tony Cragg et la série BD d’Ad Reinhardt programmés par Enrico Lunghi.
Commençons notre parcours par l’Orangerie où Bernard Marcelis a choisi de montrer Bernar Venet. Les visiteurs seront d’emblée charmés par les deux sculptures monumentales idéalement disposées dans l’espace public. L’une se référant à sa série des Angles semble dialoguer avec le clocher de l’église environnante, l’autre, relevant de la série des Lignes indéterminées trouve naturellement sa place dans le parc. Pour la première fois en Belgique l’artiste français présente dans la galerie une sélection de gravures. Cerise sur le gâteau, une installation de 1963, « Tas de charbon », période conceptuelle de l’artiste, est réactivée dans la rotonde. Un tas qui répond de manière plus modeste à un autre tas, visible lui à la Fondation du Muy, créé par l’artiste dans le sud de la France où le visiteur pourra y admirer, pour une petite poignée de dollars à régler sur le net, l’Effondrement, une installation pharaonique qui rassemble 200 arcs d’acier de 200 tonnes. A Bastogne, c’est à une dimension plus humaine que le visiteur est convié.
C’est également sous le signe du métal que se décline l’autre proposition sur le site de Montauban Buzenol, avec un collectif d’une dizaine d’artistes, certains de renom, épousant la veine minimaliste. Il est question de perforations avec la jeune artiste belge Valérie Vogt. Son installation (une nouvelle production) sur la façade latérale du container en croix dégage une force poétique: les perforations qui affleurent à la surface de ses plaques inox laissent filtrer la lumière et renvoient la nature environnante. Non loin de là, à l’arrière du container est fixée au sol l’étoile à cinq branches constituée de barrières de sécurité détournées de Xavier Mary. C’est la première fois que l’artiste expérimente en pleine nature ses productions sculpturales, une expérience à poursuivre… Autre surprise, l’Olivier en fil de fer barbelé, une pièce unique de l’artiste Abdul Rahman Katanani. Deux interventions qui nous rappellent que le monopole en art contemporain fait partie du passé (1). Toujours au premier étage de l’Espace René Greish, confronté à l’olivier de Katanani, un diptyque de Daniel Buren. L’artiste active ses bandes verticales blanches en les faisant alterner cette fois avec des bandes de métal attaquées à l’acide. Résultat: un double damier mural du plus bel effet. Sur le même étage, Véronique Joumard déploie ses « Ressorts » qu’elle mets en tension entre sol et plafond. Une pièce visuelle très simple où les perceptions sensorielles poussent le visiteur à la transgression. À découvrir les allusions métaphoriques aux Ailes du désir de Vincent Barré à l’étage supérieur et les interventions subtiles de l’artiste minimaliste américain Peter Downsbrough se déclinant en éléments dispersés dans la nature du lieu : Au Rez, un film qui répond à la nature du contenant. Au premier, ses bandes ahésives scandées sur la vitre répondent à ses lignes verticales et parallèles déployées à l’extérieur. Plus à l’écart les accumulations des sculptures sommiers d’Eric Baudart semblent léviter en silence. Avant de quitter le lieu, ne pas oublier de visiter le bureau des Forges pour y découvrir une petite oeuvre de Nicolas Schöffer dénommée “Lux”, de toute beauté et d’une modernité intemporelle. La sobriété est de rigueur dans une mise en scène qui met, pour notre bonheur, le côté spectaculaire en veilleuse.
Lino Polegato
L’Orangerie, jusqu’au mois d’octobre pour les sculptures de Bernar Venet en plein air, et jusqu’au 27/10 pour l’expo des gravures.
CACLB Espace René Greisch, site de Montauban Buzenol jusqu’au 3/9/2017: Métallifère, expo collective.
(1) Gilberto Zorio n’a pas le monopole des étoiles, tout comme Abdel Abdessened et ses Christ en souffrances n’a pas le monopole, lui non plus, du barbelé…
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