Le Prix Marcel Duchamp à la Centrale

Première du genre, le prix Marcel Duchamp s’expose en Belgique, au sein de la Centrale for contemporary art. “Invitation au voyage” rassemble les oeuvres des 14 artistes lauréats depuis sa création en 2000 par des collectionneurs français (ADIAF).

Pour fil rouge de cette exposition, relève Alfred Pacquement, commissaire, les idées de déplacement et de géographie sur lesquelles travaillent beaucoup d’artistes. En cette époque de mondialisation, le voyage constitue un point de repère. Qui prend ici différentes formes et interprétations au fil des oeuvres.

L’exposition s’ouvre sur une installation d’objets de Faber Lorne, l’un des deux artistes belges invités à la Centrale/box, lauréat du Prix Médiatine 2014. Une petite chapelle précaire, avec des objets sacralisés. Après la mort restent des objets à l’esthétique précaire comme des canettes de bière, etc. Je m’y suis intéressé et à partir de matériaux et signes qui me sont propres, j’ai créé cette chapelle avec cinq étoiles autour. Trois peintures entrent en résonance avec l’installation. Autodidacte, Faber Lorne dévoile dans son travail l’intérieur d’une topographie du désir tracée par le couplage des objets/signes entre eux, afin d’explorer les mécanismes psychiques de l’homme comme le désir, le fantasme, l’anxiété, l’aliénation ou la paranoïa.

Dans l’espace contigü, Claude Closky a investi un mur de mots, soit un papier peint Marabout qui enchaîne les mots selon la phonétique de leur dernière syllabe, et un présentoir de photos en format carte postale. L’artiste français travaille sur les médias, l’ inventaire et l’archive. Textes, images, signes, papiers peints, peintures… Il questionne le déplacement à l’ère du virtuel. Il s’agit ici d’images trouvées sur internet de monuments urbains, iconiques pour la plupart, replacés dans d’autres lieux, paysages ou continents. Cela crée une sorte de mise en abyme, une nouvelle vision du lieu. Tout ça sans me déplacer, et à partir d’un logiciel de repérage de villes.

Dominique Gonzalez-Foerster invite également aux voyages, réels ou fictionnels, et sonde les nouvelles technologies comme dans l’installation Riyo qui retrace une conversation en voix off avec les premiers téléphones portables. Plus récemment, les lettres vinyles collées sur le mur d’un rêve passé, Old Dream, réfèrent à une installation de la Tate Modern, qui a transformé le Turbine Hall en un abri dans un Londres futuriste.

Abstraction poétique

Carole Benzaken elle, interpelle le statut de l’image à travers la peinture, la vidéo, des tables, des caissons lumineux… et s’inspire des nouvelles quotidiennes, de la mythologie ou de l’histoire de l’art. Dans trois acryliques sur toile abstraites, elle évoque le retour en France, après sept ans passés à Los Angeles, à travers des images paradisiaques altérées par le temps, mais aussi la fragilité de représentation de ce que le paysage ne veut pas transmettre.

Mattieu Mercier crée des objets à partir de fonds de tiroir, sourit-il, en désignant une oeuvre murale de grand format, inspirée de trois serviettes qui pendaient dans une chambre d’hôtel et intitulée avec ironie “Sans titre (Lascaux 944/924 on a ground of Unik 012-1A)”. Fidèle au brouillage de pistes et à une approche anti-consommation de masse. A côté, un autre “Sans titre”, un néon à l’éclairage agressif, qui éclaire peu, une pub abstraite, à la forme flexible pour créer un jeu, du lien.

Parmi les oeuvres fortes, relevons encore, placées tout au fond de l’espace d’exposition, côte à côte en angle droit, les oeuvres de Tatiana Prouvé et Saâdane Afif. Les espaces architecturaux imaginés par l’artiste d’origine italienne prennent vie sous forme d’installations ou de dessins. La série Intranquillity présente des dessins d’intérieurs et extérieurs, où se juxtaposent ou cohabitent miroirs et reflets, surexpositions ou effacements. Dans la série Rémanence, on retrouve les mêmes scènes, plus obscures, tels des négatifs photographiques.

De son côté, l’installation Blue time, Sun Burst de Saâdane Afif réinvente l’espace d’exposition et y associe du son: avec un corps d’une guitare en bois accroché au mur comme un rayon de soleil, des câbles, un Ampli, un étui, un texte mural. Le son régulier y mesure le temps, et sur l’étui de guitare des écussons relatent les déplacements de l’oeuvre au gré des expositions.

Catherine Callico

 

A la Centrale for contemporary art jusqu’au 11/06, www.centrale-art.be

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