Le dernier repas de Patrick Guns

Patrick Guns investit les murs du Mac’s, le temps d’une première exposition monographique dans un musée belge. Avec des oeuvres fortes, empreintes de cynisme et de poésie, qui proposent un regard posé et décalé sur le monde.

“I know a song to sing on this dark, dark, dark night”. Pour titre de l’exposition, les paroles de la chanson Noah’s Ark de David Lynch, entendues par hasard.  Pour Patrick Guns, cela relevait de l’évidence. La fuite, le déracinement… et autant d’échappées à la noirceur du quotidien, du monde contemporain qu’il ne cesse d’observer et de questionner au fil de ses oeuvres. Au travers de thèmes forts comme la peine de mort, l’intégrisme religieux, l’immigration forcée, le pillage culturel ou les catastrophes naturelles.

Le tout, avec une apparente légèreté, sans trop s’engager. A coups de jeux de mots et d’images, de couleurs, de références artistiques ou à des citations, d’un langage protéiforme: dessin, sculpture, vidéo, photo, collage. De sa première invitation au Mac’s en 2008, où les visiteurs étaient accueillis par l’installation My Own Private Idaho, un homme-bilboquet qui avait perdu la tête, une allégorie de la folie politique et économique ambiante. A cette première exposition monographique dans un musée belge. Ici, une fois passés le hall d’accueil et une fresque iconoclaste réalisée par un graffeur, la première salle présente des dessins à l’encre bleue du Bic Cristal, jetable et icône de la société de consommation. Au fond de la pièce, l’homme-bilboquet (qui représente ici l’écolier à tête de bille, logo de la marque) s’est pendu.

Evocation de la mort encore, dans la salle Pont, où de part et d’autre d’un long couloir, s’alignent vingt-huit photos de l’oeuvre peut-être la plus marquante de Patrick Guns, My Last Meals. Soit les repas souhaités par des condamnés à mort au Texas. L’artiste a demandé à des chefs étoilés de les préparer, en hommage aux condamnés disparus. Si Patrick Guns se défend de traiter de la mort, elle traverse pourtant son travail depuis deux décénnies, comme en témoigne encore sa vidéo “Vingt minutes sous terre”, au centre du couloir. Un homme (lui), la tête sous terre, y lit 300 verbes de la langue française. Des verbes de toute une vie, jusqu’à la fin fatale: “dégénérer, vieillir, mourir”.  Mais ici encore, point de mélancolie, car l’ ironie flirte avec la poésie.

Catherine Callico

Mac’s
>29.09

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