Kanal-Pompidou, version brute

GONDRY Michel UFA par @HervéVéronèse 2

D’ici à juin 2019, Kanal – Centre Pompidou accueille les visiteurs dans sa formule ‘Brut’, à savoir que l’ancien garage, évidé, prêtera ses murs à des expositions -art visuel, architecture, design-, performances et autres moments culturels. Puis dès l’automne suivant, débutera un vaste chantier jusqu’en 2022 – année annoncée de l’ouverture officielle -, en vue d’une reconversion architecturale ambitieuse de l’ancien garage Citroën en pôle artistique.

Le projet lauréat, mené par les trois bureaux noAarchitecten (Bruxelles), EM2N (Zurich) et Sergison Bates architects (Londres), souligne les particularités du bâtiment iconique: la grande frise extérieure blanche est prolongée pour encercler tout le bâtiment sous la forme d’un ruban lumineux, qui pourra diffuser des informations ou s’inscrire dans un projet artistique. Le showroom, évidé et restructuré, accueillera des installations, performances et concerts au rez-de-chaussée, et au dernier étage un restaurant. À l’intérieur, une « rue » transversale traversera le site de 35 000 m2, donnant notamment accès à trois grandes « boîtes dans la boîte », insérées dans les anciens ateliers.

Ceux-ci hébergeront le musée d’art moderne et contemporain -avec des espaces d’expositionrépartis sur quatre niveaux, le CIVA et un auditorium de 400 places. La fluidité interdisciplinaire sera de mise, notamment via des collaborations avec le Kaaitheater, les Brigittines ou la Raffinerie – Charleroi Danse.

Du rez aux combles

D’ici là, chaque recoin de la structure existante est investi: ateliers, bureaux, cuisine, ou vestiaire. Pour fil rouge, des oeuvres qui font écho à l’histoire du bâtiment, sociale, architecturale -industrielle des années 30-, et à son contexte urbain, pointe Bernard Blistène, commissaire général et directeur du Musée national d’art moderne – Centre Pompidou.

La série en laque sur tôle (Antisculpture, Convexe N°1) de Jean Dewasne, constituée de pans de voitures de course peints des deux côtés, trouve ainsi place dans l’atelier de carrosserie. Entre ready made et peinture abstraite, en aplats qui estompent les reliefs de la carrosserie, l’oeuvre polychrome s’inscrit dans la veine pop art. Au même niveau, d’autres pièces en tôle rendent hommage à l’espace bruxellois. Pliée, ondulée, perforée… entre constructions cinétiques et structures minimales, voire conceptuelles, la tôle est explorée dans l’art dès les années 50, dans le sillage des précurseurs Julio Gonzalez ou Antoine Pevsner.

Le premier étage de l’atelier, vaste plateau qui met en abyme les atouts esthétiques du lieu, présente des pièces de grand format, comme la Maison tropicale de Jean Prouvé et le Pavillon LiquidKristal de Ross Lovegrove, qui associe architecture et design numériques. Toyo Ito y a suspendu son habitat nomade, imaginé pour le tissu urbain saturé des métropoles japonaises ‘PAO II: A dwellings for The Tokyo Nomad Women’.

Autre oeuvre majeure, participative cette fois, l’ Usine de films amateurs de Michel Gondry, déployée au service Electro du rez de chaussée. En groupe de 5 à 15 personnes, tout un chacun est invité à suivre les étapes de réalisation d’un film. Ecriture de scénario, fabrication d’effets spéciaux, tournage dans différents décors vintage (les pièces d’une habitation, un plateau de bureaux, un restaurant belgo-français…), etc. Au bout de 3 heures, on ressort du studio avec le DVD de son propre film.

Itinérances

De jolies pièces certes, des icônes aussi, qui prennent tout leur relief dans la singularité du lieu. On déplore pourtant parfois un air de déjà-vu. La plupart des oeuvres étant issues des collections du Centre Pompidou, à la politique accrue de prêt et d’itinérance. Comme la DS de Gabriel Orozco présentée dans le showroom de Citroën et l’une des pièces phares de l’exposition Lille XXL au Tri Postal en 2012, ou la construction de Prouvé. Toujours en lien avec Lille, l’ Usine de films amateurs peut faire penser à l’Hotel Europa, proposé depuis 2009 à la gare St Sauveur. Tant dans les décors créés que dans le concept. Les pièces de cet hôtel de plein pied sont confiées à des artistes: chambres, salons, hall d’entrée… et évoquent l’histoire de villes comme Berlin, Moscou ou Cuba. Le visiteur est libre de se promèner, s’allonger sur un lit, s’adonner à des écoutes sonores, voire d’y fêter un événement durant 30 à 60 minutes.

Un pion européen

Metz, mais aussi Malaga, Bruxelles et bientôt Shanghai: les antennes du Centre Pompidou, dirigé par Serge Lasvignes, haut fonctionnaire jusque là « inconnu des circuits artistiques » relève le journal Le Monde, ouvrent la polémique ça et là. En Belgique, la rente annuelle de 2 millions d’euros versée par la Région de Bruxelles-Capitale jusqu’en 2027   choque le milieu et le quidam, dans un pays qui en sus concentre le plus de collectionneurs privés, et dont les pièces inédites se dérobent aux yeux du public. Par ailleurs, le projet défendant une vocation européenne, Bernard Blistène n’envisage nullement sa relève dans un an par un commissaire belge, mais évoque déjà un successeur allemand. A l’image de cette Europe dominée par le couple franco-germanique, au glamour étiolé.

Catherine Callico

 

 Kanal-Pompidou

QUAI DES PÉNICHES
1000 BRUSSELS — BELGIUM

info: http://www.kanal.brussels

 

 

 

 

 

 

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