L’Arte Povera a la cote pour le moment, notamment avec le Frac Nord Pas de Calais et la collection mise sur pied par Jan Hoet. Une autre exposition, tout aussi importante pour ce collectif a lieu pour le moment au Centre culturel de Strombeek. Elle a été mise sur pied par Luk Lambrecht en collaboration avec le SMAK sous le titre générique A-Z. Elle se déroule en deux parties.
Dans la première partie, Luk Lambrecht a eu l’intelligence de faire resurgir de l’oubli Emilio Prini, l’anti star du groupe, respecté pour son côté radical et conceptuel. Emilio Prini représenté dans l’expo par Cornelia Lauf, critique d’art américaine, est intervenu avec un projet ancien repensé et redessiné spécialement pour la salle hexagonale du Centre. Un crédit de reconnaissance apprécié par Luk Lambrecht. La deuxième partie de cette rétrospective réunit pour le moment des œuvres de Giovanni Anselmo et de Gilberto Zorio. Elle est visible jusqu’au 12 décembre prochain. On pourra y redécouvrir quelques oeuvres emblématique qui ont fait la renommée des deux artistes. Deux pièces de Zorio sont bien mise en valeur: la stella incandescente accompagnée de son javelot se retrouve face à sa sculpture en terre cuite “Per purificare le parole” ; la purification des paroles s’effectue par un processus d’inhalation sur base d’effluves de Vodka. A experimenter sur place La poésie visuelle des oeuvres d’Anselmo traverse l’espace et les âges, d’une simplicité minimaliste mais d’une énergie palpable, à l’image des flux invisibles que dégagent ses torsions. En écho à cette mini rétrospective, Luk Lambrecht présente deux jeunes artistes italiens : Dario D’Aronco et Roberta Gigante. Une manière pour lui d’affirmer que l’Arte Povera ne s’est pas fossilisée avec l’institutionalisation archivée dans les musées et grandes collections mais continue d’exister sous différentes attitudes mixant art et vie. Pour qui connait le Centre culturel de Strombeek le manque de surface d’exposition est son point faible. Ce problème a été contourné depuis peu par l’ouverture d’un espace au sous-sol. Un vaste périmètre d’exploitation donne l’occasion à des artistes non encore confirmés sur la scène internationale de se confronter au public. Pour la troisième fois consécutive les caves sont utilisées à cet effet. Pour le moment, comme l’ont fait en leur temps leurs ainés Anselmo et Zorio, Roberta Gigante et Dario D’Aronco continuent le travail d’exploration entre l’art et la vie. Pour Roberta Gigante, il s’agit du souvenir cartographié de son propre parcours spéléo ( dans une grotte proche de Lascaux ) qu’elle redessine de mémoire par deux interventions sur le mur. Dispersés dans l’espace, une série de moulages en terre cuite de ses mains sont exposés. Particularité de ce travail, elle choisit de ne montrer que la partie externe du moule, masquant ainsi le sujet principal. Le visiteur est prié de faire tourner le “socle tour” pour que la magie du lien fonctionne… Autre type de circularité chez Dario D’Aronco, l’artiste décortique en boucle toutes les phases de transformation d’un aplat de couleur rouge déposé sur un folder. La phase finale est visible dans une chambre noire spécialement imaginée par l’artiste, on peut y voir en noir et blanc l’image scannée du folder tournant sur lui-même. Cette exposition sera aussi une occasion pour le visiteur de découvrir le travail de ce Centre culturel Bruxellois hors norme, reconnu dans le milieu par la qualité des expos qui s’y déroulent. Lawrence Weiner sera le prochain invité. Souffrant, comme beaucoup d’autres, de la diminution de ses subsides (-3%) Luk Lambrecht est loin de se décourager. Au contraire, il change de stratégie et rebondit en prônant d’autres priorités dont l’engagement à temps plein d’un assistant. C’est tout le travail éditorial d’archivage qui subira les conséquences et qui devra être repensé… Présent lors du vernissage, Gilberto Zorio nous a consacré une longue interview, visible sur le site. Un recensement en sera fait dans le prochain FluxNews qui sortira fin janvier. Gilberto Zorio met en lumière le rôle de rassembleur d’artistes et non de théoricien tenu par Germano Celant. Une nouvelle histoire de L’Arte Povera devrait sans doute être écrite en spécifiant davantage le rôle des artistes oubliés, les précurseurs comme Elizeo Mattiacci ou des galeristes inspirés comme Gian Enzo Sperone qui en se connectant aux réseaux de l’époque ont contribué à faire exister ce collectif internationalement. Gilberto Zorio a été présenté en 1973 à Bruxelles à la galerie MTL puis chez Albert Baronian en 1978 qui prendra le relais avec d’autres artistes comme Mario Merz et Giulio Paolini.
Lino Polegato
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