A l’heure actuelle, nous ne comptons plus les manifestations dédiées à l’art sonore. De festivals en expositions, de lieux institutionnels en lieux alternatifs, il s’expose sous toutes ses formes. « Laisser les sons aller où ils vont » (FRAC Franche-Comté) est une nouvelle illustration de sa forte présence sur la scène institutionnelle.
Avec cette exposition dont le titre est tiré d’une citation de John Cage, le FRAC Franche-Comté, installé à Besançon, propose une exploration de la matière sonore au sein de ses propres collections. Prenant pour point de départ les idées de Cage, figure incontournable ayant fortement influencé le développement de l’art sonore, l’institution a sélectionné des œuvres qui permettent d’exploiter les notions de silence, de hasard et d’indétermination chères à l’artiste. Au sein de l’exposition, images sonores des uns se superposent aux sons sculpturaux des autres. Thomas Fletchner présente « Walks » (1999), une série photographique qui, si elles restent définitivement silencieuses, laisse l’imaginaire s’approprier les sonorités provoquées par une marche en milieu enneigé. Atsunobu Kohira convoque aussi l’imaginaire en rendant visible le son. Matérialisant par la lumière les gestes d’un orchestre en pleine action, il nous invite de la sorte à rejouer intérieurement la composition musicale (« Ouverture de la Chauve-Souris », 2010). Artiste pionnier de l’art sonore, Paul Panhuysen joue de l’éphémère et de l’indétermination propre à la pratique avec « Boléro Solaire » (2012). Exposée à l’extérieur, l’installation génère des sons en fonction de l’intensité lumineuse. A chaque visite, à chaque placement corporel, à chaque moment de la journée, l’œuvre évolue et se transforme.
Pour compléter la présentation, le FRAC s’associe au CNAP qui prête, pour l’occasion, quelques œuvres de son importante collection. On se réjouit de pouvoir expérimenter à nouveau « from here to ear » de Céleste Boursier-Mougenot dans laquelle, tout comme pour Panhuysen, le son est soumis à l’indétermination, grâce aux déplacements des mandarins et à leur arrêt sur les cordes de guitares. Dans l’exposition, le son va comme il veut, il ne se dévoile jamais brutalement. Il requiert toujours du temps, pour être appréhendé au risque sinon d’être occulté. L’exploration sonore nécessite une attention particulière, comme avec « As the World turns » de Katie Paterson (2010). Diffusée par un tourne-disque dont la vitesse de rotation est modifiée pour correspondre à la rotation de la terre, la mélodie de Vivaldi (« Les Quatre Saisons ») devient imperceptible et pourtant toujours présente.
« Laisser les sons aller où ils vont » marque une nouvelle fois l’intérêt certain développé par le FRAC Franche-Comté à l’égard de l’art sonore. Accessible jusque fin septembre, elle offre l’occasion de se plonger dans l’exploration à la fois sensible et poétique du son, cette matière qui nous entoure, nous envahit et ne peut que très rarement être circonscrite.
Céline Eloy
« Laisser les sons aller où ils vont », jusqu’au 21 septembre 2014
Frac Franche-Comté
Cité des arts 2 passage des arts
Besançon
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