MARSEILLE  Di Rosa, une ethnologie polychrome

Vue de l'expo © Adagp. Pierre Schwartz

« Un air de famille » intègre Di Rosa au sein d’un clan bien plus vaste que celui du familier, dans la mesure où ses liens de parentés sont nombreux avec les arts naïf, forain, brut, expressionniste, modeste…

L’expo est nourrie d’une centaine d’objets puisés dans la collection du Mucem ; il s’agit aussi bien de mobilier que d’armes, instruments musicaux, jougs d’attelage, jouets, maquette, marionnettes, machine à laver antédiluvienne, orgue de foire monumental, menus escarpins extravagants de Mistinguett et autres étonnements amusés et à musée.

La cohabitation entre des éléments à portée ethnologique témoignant d’une part de l’existence d’une communauté humaine et  d’autre part l’expression individuelle d’un artiste issu lui-même de cette communauté produit un ensemble parcouru par une énergie particulière. D’un côté, des témoins ; de l’autre, un acteur. Reste au touriste muséal à partir en croisière entre différents îlots thématiques.

D’emblée, Di Rosa affirme son ancrage local en offrant aux visiteurs une série de portraits rassemblés de Marseillais : des visages typés à gros traits, campés tels une foule bon enfant en attente de quelque événement festif ou curieux. S’y adjoignent de grandes offuscations, panneaux métalliques ajourés atténuateurs de luminosité rappelant les ‘moucharabiés’ chers à l’architecte des lieux, Rudy Ricciotti. Leur géométrie laisse percevoir des choses et des physionomies. Synthèse d’une des intentions de cette expo : mêler technologie actuelle et inspiration puisée aux quatre coins géographiques et temporels de l’histoire de l’art et de la vie quotidienne.

Le tout s’avère volubile comme la parole de Di Rosa et populaire comme toutes traditions artisanales. Voici, comme si elles descendaient l’escalier célèbre des revues de cabarets parisiens, des centaines de figurines et statuettes cavalcadant hors d’une armoire ancienne, défilé bigarré de personnages de contes, de b.d., de jeux vidéos, de poupées enfantines, de dessins animés, de supports publicitaires, de science fiction, magma impressionnant qui brasse des icones religieuses, culturelles, commerciales, mythiques.

Guère de frontière entre ce qui appartient aux loisirs, aux pratiques professionnelles, aux connaissances culturelles et patrimoniales. Leur présence a manifestement pour origine la biographie de Di Rosa, en laquelle une majorité de visiteurs reconnaitront une partie de la leur. Escale incontournable que cette maquette d’immeuble réalisée avec son propre frère à propos de « La vie des pauvres gens ». Etapes inévitables que celles dédiées à l’étranger ou aux robots.

La polychromie permanente crée une atmosphère carnavalesque, joviale, optimiste qui ne gomme pas pour autant des aspects moins agréables du genre inégalités sociales, pénibilité du travail. L’ambiance se pimente d’un humour omniprésent. Que ce soit à travers des parodies de la description par Uccello de la célèbre bataille « San Remo » du XVème siècle, soit via des vaches customisées entre des jougs en bois, soit un bas-relief de pieds hilares…  Une expo qui invente un nouveau temps de conjugaison, le « passé présent ».

Michel  Voiturier

« Un air de famille », au MUCEM (Musée des Civilisations de l’Europe de la Méditerranée) à Marseille jusqu’au 1 septembre 2025. Infos :   +33 4 84 35 13 13 ou https://www.mucem.org/

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